« L’histoire n’aurait jamais pu s’écrire si trois amies ne l’avaient poussé vers son destin. »
Voilà la première phrase du roman qu’on aurait pu écrire sur celui qui se cache derrière le blog « Livraison de mots ».
Livraison de mots : c’est son label, c’est sa marque. Mais c’est une référence, un lieu atypique où livres, mots et photos s’entremêlent autour d’un jeune homme de vingt-trois ans. François de son prénom.
Comme dans un roman, on le rencontrerait au beau milieu de l’Avenue Louise, en train de marcher, téléphone à la main, livre dans l’autre. Et puis, nous nous arrêterions pour l’interpeler. En route vers un de ses lieux où il aime lire, nous l’accompagnerions. Il nous raconterait… Livraison de mots : c’est devenu ma vie. Je me lève avec un livre sur le bord du lit. Je l’ouvre à l’endroit où je me suis arrêté la veille. Et je poursuis ma lecture. Une fois terminé, j’essaye de réfléchir à la mise en abîme photographique que je pourrais faire de ce livre. Je prends quelques fleurs, quelques autres éléments de décor, je le photographie. Et ensuite j’écris. J’écris ce que j’ai pensé du roman, de la b.d. ou du livre jeunesse et je reste moi-même. Je ne me laisse ni influencer par mes collègues, ni par les critiques littéraires des journaux de presse.
À dix-sept ans (bien qu’on ne soit pas sérieux selon Rimbaud), celui qui se cache derrière le blog et le profil Instagram ne lisait pas. Pas un seul livre si ce n’est ceux imposés par l’école (qu’il avait du mal à lire). J’ai raté toutes les interrogations de français concernant des lectures imposées. Parce que je n’aime pas qu’on m’impose quelque chose. J’aime la liberté. Les livres qu’on me proposait de lire pouvaient me plaire, mais je n’aimais pas qu’on me demande de les lire dans un temps imparti. D’ailleurs, aujourd’hui, c’est très clair avec les maisons d’édition : j’accepte les livres, j’accepte de les lire, mais pour le timing : c’est moi qui décide. Une lecture, ça ne se commande pas. Durant son adolescence, il n’écrit pas non plus. Il se passionne pour les réseaux sociaux et la mode (un peu). J’étais déjà sur Facebook, mais je n’ai jamais réellement publié de contenu. Pas d’album photos comme ce fut la mode, ni de publications écrites. Très vite, j’ai été sur Instagram. Ce réseau m’intriguait. Et puis, j’aimais bien la photo. Même si aujourd’hui je suis régulièrement derrière l’objectif, j’aimais bien être devant quand j’étais plus jeune.
Plus il grandit, moins il s’intéresse aux livres jusqu’à ce qu’il découvre, alors déjà en Haute École, que certains s’adonnent à une passion bien étrange : le booktubing. En bref : des Youtubeurs qui se spécialisent dans le livre là où d’autres parlent de maquillages et de cinéma. Je ne sais pas pourquoi, j’adorais les regarder. Je ne parlais que d’eux, je ne regardais qu’eux. C’était très étrange. Mais, c’est comme ça, ça m’intriguait. Et puis, cette façon qu’ils avaient de vous donner envie de lire le livre qu’ils présentaient me fascinait.
Il se passionne à regarder ces gens, derrière leur caméra, présenter tel ou tel auteur édité par telle ou telle maison, écrivant sur tel ou tel sujet. Bref, il n’en démord plus. Il les regarde tous. Je ne dirais pas que c’en était devenu maladif, mais j’avoue que je passais énormément de temps sur Youtube.
Un jour, trois amies (ses meilleures) lui livreront les mots qu’il attendait sans doute inconsciemment : « Fais comme eux !, Lance-toi !, Crée ta chaîne ! ».

Déjà actif sur Instagram, il découvre alors que certains profils commencent aussi à se spécialiser. En bref, que les livres débarquent sur le réseau social pourtant dédié aux photographes. Il y a eu comme ça une vague de #bookstagram, les bookstagrameurs étaient nés, c’était encore plus fascinant. D’un coup, comme ça, le phénomène a pris. Et ce fut intéressant d’assister à cela. Les chroniques littéraires s’écrivent alors en quelques milliers de caractères en légende d’une ou plusieurs photos. De nouveau, il est subjugué. Et les mots tantôt livrés par ses amies vont le lancer sur une piste…
J’étais en dernière année des études en communication que j’avais entrepris. Je devais choisir un thème pour le TFE que je devais rendre en fin d’année académique. Au début, je pensais faire des recherches sur le milieu musical. Car à ce moment-là, il se voyait bien attaché de presse d’un artiste musical (grand admirateur de Lorie, Jain et Christine and The Queens, le milieu de la scène l’a toujours intéressé). Mais je me dis que cela pourrait être intéressant de le faire sur ces booktubeurs, sur cette façon qu’ont certains de parler des livres sur les réseaux sociaux.
Il écrira donc sur le phénomène virtuel des livres qui se font raconter sur les réseaux sociaux, des mots qui sont livrés sur la toile. Et il se fixera une date, celle du 18 mars pour créer son propre blog, pour développer sa propre plume critique. J’ai terminé d’écrire mon TFE le 17 mars. Et dans mon plan j’avais prévu que le 18 je lancerais les hostilités. Je ne savais pas comment, mais je savais que le 18 mars je débuterais quelque chose.
Découvrez sa dernière chronique en cliquant ici !
« Comment se tuer sans en avoir l’air » de Patrick Rambaud sera le premier livre sur l’échafaud. « Un véritable manuel pour ceux qui souhaitent se suicider avec élégance » écrit-il en légende de la photo faite du livre dans sa main.
Très vite, sa façon de faire, sa manière de dire et de mettre en scène les livres vont plaire. Presque six mille personnes le suivent quotidiennement. Médiatique, parce que disponible, il sera le community manager de la Foire du Livre de Bruxelles édition 2019 : une aventure inoubliable dont il aura du mal à s’en remettre une fois le glas sonné. Le lendemain de la Foire, j’ai pleuré. J’étais dans mon lit et j’ai pleuré. Des amitiés sont nées et surtout, l’aventure humaine fut intense. C’était dingue, inimaginable.
Tout ça en peu de temps : même pas une année puisque le blog fêtera sa première année en date du… 18 mars 2019.
Lisez son compte-rendu de sa mission à la Foire du livre en cliquant ici.
La tête dans les étoiles, ses pieds sont bel et bien sur terre. Entouré de ses proches et encouragé (à fond!) par son compagnon, il reste ancré (ou encré …) dans la réalité de la vie. Mon copain me donne toute la force nécessaire pour y arriver. Il m’encourage. J’ai la chance de l’avoir. C’est exceptionnel. D’ailleurs, sans lui, il ne serait sans doute pas à Bruxelles. Je suis originaire de Liège, mais je suis plus souvent sur Bruxelles. Et finalement, la capitale est le lieu où tout se passe. Si je ne venais pas ici régulièrement, ce serait plus compliqué…
A côté du blog, du profil instagram, François livre ses mots aussi aux enfants et aux adultes au sein de divers endroits culturels du pays. Je débarque avec des décors, mon appareil photo et des livres. Et on y va. J’explique comment je réalise mes photos, comment j’écris, … Il dévoile ses secrets, l’envers de son décor. Au final il explique : c’est quoi être chroniqueur, comment on le devient…
Le conseil qu’il donne : c’est de ne pas penser à devenir une star en se lançant dans ce milieu bien codé. Simplement s’offrir tel qu’on est. Il ne faut pas chercher à ressembler à tel ou tel autre bookstagrameur. Il faut être soi, sans forcément planifier. Rêver et oser se précipiter. Et surtout, ne pas croire que le milieu est bouché. « Il y a de la place pour tout le monde » répète-t-il à tout qui voudrait se lancer.
Son rêve : être l’attaché de presse d’un auteur ou d’une maison d’édition. Peut-être écrire dans un journal, une revue ou sur n’importe quel support tant qu’il garde cette liberté qui le caractérise. Lui, il dit ce qu’il pense. Il n’écrit pas pour faire plaisir, ni à l’auteur, ni à la maison d’édition. Il dit ce qu’il ressent, pas ce qu’on veut lui faire dire. Il livre ses mots, pas ceux des autres. Un personnage de roman en soi. Peut-être un auteur en devenir…